Historique
Le LYCÉE Victor et Hélène BASCH est un lycée général et technologique implanté à l’ouest du quartier Nord Saint Martin de Rennes.
Les trois croix de pierre, encore visibles sur le site, donnèrent son nom au lycée agricole qui occupa les lieux avant d’être transféré au Rheu. En septembre 1978, 172 élèves de seconde furent les premiers usagers de ce « nouveau » lycée que l’on appela lycée de Villejean en référence à son secteur d’implantation. L’augmentation des effectifs (jusqu’à
170 0 en 1991) imposa pendant plusieurs années l’utilisation de locaux du collège de la Harpe (aujourd’hui affectés à l’Université de Rennes 2), puis la construction d’un nouveau bâtiment… Parallèlement, l’appellation Villejean disparaît au profit de « Ile-de-France », du nom de l’avenue qui le borde. Mais, en 1994, cette avenue prend le nom de Charles Tillon…
Depuis décembre 2005 notre Lycée s’appelle officiellement Victor et Hélène BASCH.
Le 10 janvier 1944 , les corps de Victor et Hélène BASCH sont découverts à Neyron dans l’Ain après leur assassinat par des miliciens. Cela a fait taire leurs voix, mais n’a pas éteint la force de leur idéal.
« Cette vie, je l’ai une fois pour toute donnée à la République » disait celui qui ne se dérobait jamais à ses obligations de professeur, de citoyen, d’homme libre, et qui éprouvait si souvent le sentiment de la pitié. Il faisait de toute injustice une affaire personnelle, pour mieux en appeler avec véhémence à l’opinion publique.
Victor a eu un parcours scolaire et universitaire brillant :
Arrivé de Hongrie en France à l’âge de 2 ans, on le retrouve, pour ses études secondaires à Paris au lycée Condorcet. Au bachot, le correcteur inscrit ce seul mot sur sa copie de philosophie : « extraordinaire ».
Etudes supérieures à la Sorbonne. Il y obtient, premier de sa promotion, sa licence de philosophie. Malade lors des épreuves d’agrégation, il se présente à celle d’allemand. Il y est reçu quatrième. Il présente deux thèses de doctorat, une sur Kant, l’autre en latin sur Schiller. Il enseigne à l’Université de Nancy de 1885 à 1887, puis à celle de Rennes de 1887 à 1906, et ensuite à la Sorbonne.
En 1885, il épouse à Budapest Hélène FURTH, fille de commerçants de cette ville. De cette union naîtront 5 enfants. 4 ne leur survécurent pas ; l’un, Georges, se suicidera en 1940.
Sa compagne de 60 ans de vie commune fut sa confidente. La correspondance abondante échangée à l’occasion de fréquents déplacements en témoigne. Celle qui a partagé à ses côtés les bons et les mauvais jours n’aurait pas accepté de le laisser partir seul pour son dernier voyage. Unis dans la vie, ils ne laissèrent pas la mort les séparer.
Du courage, il leur en fallut pour faire vivre leurs convictions, pour résister à la haine farouche que certains leur opposaient. Victor écrivit un jour que son piédestal était formé des pierres qu’on lui avait lancées.
Ils eurent durant toute leur vie à lutter contre l’intolérance et l’oppression pour se trouver un chemin structurant. Doté d’une intelligence qui forçait l’admiration de certains, attisait l’hostilité d’autres, Victor a parcouru avec bonheur de nombreux chemins de la connaissance touchant à la philosophie, l’esthétisme, la vie politique et l’art sans jamais chercher à obtenir honneurs et prébendes.
Fort de ses valeurs, Victor a mené à Rennes à propos de la révision du procès Dreyfus un combat fondateur de la Ligue des Droits de l’Homme. Il s’est présenté comme ce qu’il était déjà, un homme complet, un républicain sans état d’âme et sans double jeu, soucieux de maintenir entière la pluralité des forces qui l’animaient et la fine complexité de la réalité. Cela a fait de lui un formateur, un entraîneur d’hommes et une menace pour le cours mauvais du monde.
A leur domicile, la maison du Gros Chêne, sise 86, faubourg d’Antrain à Rennes, ils recevaient un petit cercle d’amis, principalement des artistes, des syndicalistes, des hommes politiques. Hélène veillait à tout, en maîtresse de maison, et canalisait au mieux le tempérament d’un époux parfois tyrannique et tatillon. Ceci cachait chez lui une inquiétude latente, des tourments, qui l’amenèrent en 1918 à une tentative de suicide.
En 1899, il s’est créé, chez eux, la Ligue Rennaise des Droits de l’Homme.
De 1926 à 1940, Victor présidera la Ligue Nationale des Droits de l’Homme.
Dans ce siècle troublé, les espoirs d’une société meilleure seront minés par le développement des nationalismes. Citons l’engagement au service :
– du rapprochement franco-allemand, ce qui entraîne à dénoncer le traité de Versailles
– du cycle de conférences à caractère pacifiste mises sur pied en Allemagne
– du front populaire de 1936, incarné par Léon Blum
– de la dénonciation des pogroms en Ukraine et en Hongrie
– d’un combat contre les thèses de l’extrême droite
– du soutien à l’école publique, de la défense de l’égalité politique entre les deux sexes, de l’opposition à la répression de l’avortement et de la propagande anticonceptionnelle
– des républicains espagnols dès 1936. Victor a été à l’origine de l’Office International pour l’Enfance créé en 1937. Ce comité d’aide aux enfants espagnols a trouvé en leur demeure une réalité concrète par la confection de nombre de vêtements destinés aux enfants réfugiés. Toute la famille vivait au son de la machine à coudre et s’organisait autour d’Hélène.
Avec l’avènement du fascisme au pouvoir, en particulier en Allemagne, le couple BASCH est obligé de fuir Paris et de se réfugier à Lyon où il a noué des contacts avec la résistance. C’est au soir de leur vie, à 81 ans, qu’ils furent abattus.
Depuis l’affaire Dreyfus jusqu’à la lutte antifasciste, les engagements politiques de Victor, fortifiés par la fidèle présence de sa compagne, sont imprégnés d’éthique et d’universalisme. Jamais, il n’a renoncé à la démarche analytique et critique. C’est au nom d’une transcendance marquée par les principes de la révolution française et des valeurs républicaines que cet homme de politique pensait et jugeait les événements du siècle. Ce couple uni a connu beaucoup de malheurs, mais il nous délivre un message d’espoir sur fond d’intemporalité. Ceci explique la fierté que nous avons à faire vivre leur nom.
Référence bibliographique :
Victor Basch par Françoise Basch – éd. Plon 1994